Faits divers - Monde

Procès des attentats de Trèbes et Carcassonne : « On essayait de mettre tout le monde à l’abri », le témoignage de Chloé une ancienne salariée du Super U

Le 23 mars 2018, Chloé* était employée par le Super U de Trèbes lorsque le terroriste Radouane Lakdim commettait un attentat dans le magasin en tuant trois personnes. Près de six ans plus tard, le procès des attentats de Trèbes et Carcassonne va s’ouvrir ce lundi 22 janvier pour une durée de cinq semaines. Chloé nous raconte son récit et ce qu’elle attend du procès qui donnera un point final, sauf appel, le 23 février prochain à ce terrible événement.  

« C’était une journée de travail comme les autres. » Le 23 mars 2018, aux alentours de 10 h 30,  Chloé* salariée au Super U de Trèbes fait de la mise en rayon quand elle entend un bruit sourd. « Nous faisions beaucoup de manutention, j’ai pensé qu’une palette venait de tomber au sol », se remémore-t-elle. Il s’agit en fait d’un premier coup de feu tiré par le terroriste islamiste Radouane Lakdim. Durant cette journée noire, il tue quatre personnes dont trois dans le magasin : le chef boucher Christian Medves, un client Hervé Sosna et le lieutenant-colonel Arnaud Beltrame. Un deuxième coup part. Chloé ne réalise pas ce qu’il se passe. Sa collègue, qui se trouve à côté d’elle, l’attrape et elles se réfugient avec plusieurs clients dans la réserve. « On a pris tout le monde qui était autour de nous. Certaines personnes âgées ne voulaient pas lâcher leur chariot. On ne pense pas qu’à soi, on essaye de mettre tout le monde à l’abri », souligne Chloé. Ils sont entre vingt et trente à s’être rassemblés dans cette salle du supermarché. « Je me suis demandé s’il y avait plusieurs terroristes ou s’il était seul. On ne savait pas trop où aller, puis on a compris qu’il faisait le tour du magasin. »

Vingt minutes plus tard, les victimes sortent dans la cour. Les gérants du garage Razous, qui se trouve près du Super U, ouvrent le grillage permettant d’accéder à leur local. « On s’est rassemblé à l’intérieur du garage. » Petit à petit, d’autres personnes les rejoignent notamment les caissières. « Elles se sont cachées sous les caisses quand le terroriste a commencé à tirer », précise-t-elle.

15 h 30, évacuation vers le stade

Chloé perd la notion du temps. « Je n’avais plus de batterie sur mon téléphone. Évidemment, il fallait que cela arrive à ce moment-là », déplore-t-elle. Dans le magasin, le GIGN prépare son assaut. Aux alentours de 14 h 25, Radouane Lakdim est abattu par le groupe d’intervention. De son côté, Chloé est toujours dans le garage accompagnée d’une cinquantaine de personnes. « On a été évacué par groupe vers 15 h 30 au stade. Nous suivions les consignes. »

A lire aussi :
Attentats de Carcassonne et de Trèbes – Comment les victimes se préparent au procès ? Les explications d’un psychologue

A lire aussi :
Procès des attentats de Trèbes et Carcassonne : Arnaud Beltrame a échangé sa place avec Julie, « sa foi ne transparaissait pas dans son intervention, ce n’était pas un illuminé »

En fin d’après-midi, vers 18 heures, Chloé apprend l’identité des personnes décédées pendant l’attentat : « Nous avons su tard qu’il y avait des morts, personne ne disait les choses clairement. » Dès le lendemain, elle doit replonger dans le drame : « La police judiciaire nous a reçus dans la mairie pour nos dépositions. » Les salariés de Système U reçoivent le soutien de leur direction et une psychologue s’est rendue sur place pour les aider. « J’ai fait deux ou trois séances en utilisant la méthode EMDR. En fixant un point, je me suis remémoré un passage de la journée », opine l’ancienne salariée du Super U.

J’ai beaucoup pleuré

Chloé a laissé ses affaires dans le magasin au moment des faits. Elle n’a pas pu les récupérer avant plusieurs jours. « On y est allé tous ensemble (les salariés NDLR). Ça a été plus facile à supporter. » Les lendemains ont été difficiles à vivre pour elle. « J’ai beaucoup pleuré parce que l’adrénaline qui me tenait a lâché. J’avais la chance d’être entourée grâce à ma famille, il fallait que je sois forte. »

A lire aussi :
En préparation du procès des attentats de Trèbes et Carcassonne, les parties civiles ont participé à une réunion d’information

A lire aussi :
Procès des attentats de Trèbes et Carcassonne : ce que l’on sait des sept accusés jugés par la cour spéciale de Paris

 

Le procès des attentats va s’ouvrir ce lundi 22 janvier devant la cour d’assises spéciale de Paris. L’auteur principal a été abattu mais sept personnes de son entourage sont jugées pour les chefs d’accusation « d’association malfaiteurs terroriste » et/ou « délits connexes ». À l’ouverture du procès, Chloé sera parmi les parties civiles. « J’attends que ces personnes soient sanctionnées à la hauteur de leurs actes. Ça ne me fait pas peur de me retrouver face à eux », constate-t-elle. Obtenir des réponses sera l’autre enjeu pour elle : « Ça m’intéresse de savoir comment on en est arrivé à cette folie. »

(*) Prénom d’emprunt

Media7

Media 7, votre source d’actualités en ligne. Notre mission est de fournir des informations précises, impartiales et à jour sur les événements nationaux et internationaux qui comptent pour vous.
Bouton retour en haut de la page