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Perpignan : menaces de mort et insalubrité, voisins et bailleur démunis face à un locataire atteint de troubles psychiatriques

Depuis quelques mois, des locataires d’une résidence HLM de Perpignan sont confrontés au comportement « invivable » d’un voisin. Outre l’envahissement des parties communes et des odeurs nauséabondes, l’homme, placé sous curatelle, aurait dernièrement montré des signes d’agressivité qui les inquiètent au plus haut point.

C’est la peur, et un certain sentiment « d’abandon » qui les poussent aujourd’hui à vouloir alerter. Deux mères de famille notamment, qui vivent dans une résidence HLM de Perpignan depuis plusieurs années, ne savent plus comment cohabiter avec un de leur voisin qui aurait perdu pied il y a quelques mois. Peut-être à la suite d’une séparation, supposent-elles. Car ce père de famille vivait sans problème dans l’immeuble depuis 5 ans, quand son comportement aurait soudainement changé. « Tout allait bien jusqu’en juin, où nous avons été saisis à propos de dépôts de mobilier encombrant les escaliers, remonte à présent la responsable d’agence départementale du bailleur social privé Trois Moulins Habitat (TMH), gestionnaire de ce collectif d’une soixantaine de logements. En septembre, comme il n’a pas réagi à nos courriers, on a fait retirer les affaires entassées dans les coursives », poursuit Sindy Ducros. Mais tout ne s’est pas passé comme prévu. Le locataire s’est opposé à ce « débarrassage », la police municipale a dû être requise pour sécuriser l’opération, indique encore la responsable de TMH. L’homme aurait alors récupéré le matériel dans la benne pour l’entasser à l’intérieur de son domicile. 

Le gestionnaire de la résidence HLM, Trois Moulins Habitat, a enclenché toute une batterie de procédures judiciaires pour tenter de « mettre en sécurité » les autres locataires de l’immeuble.
Independant – Olivier GOT

Et la tension serait montée d’un cran dans la cage d’escalier de la résidence perpignanaise. Selon divers témoignages, son appartement étant devenu trop surchargé, l’homme aurait commencé à dormir dans les parties communes, apparaissant dénudé aux yeux des voisins. Et rapidement, auraient recommencé à s’accumuler dans les escaliers et les couloirs « des choses diverses qu’il récupère dans la rue, dans les ordures », déplorent les voisines. Avec son lot de problèmes d’hygiène. Mauvaises odeurs et nuisibles, cafards notamment, s’installent aux abords de l’appartement.

Son appartement a pris feu et il m’a menacée avec un couteau

Puis, fin septembre, un incendie s’y déclare. Il est heureusement circonscrit par les pompiers à ce seul logement du rez-de-chaussée. Mais les riverains s’inquiètent de plus en plus et tentent d’amener leur voisin à la raison. Des échanges qui, selon plusieurs témoins, auraient à plusieurs reprises débouché sur des menaces de mort. Mi-octobre, « il m’a menacée avec un couteau », explique une résidente dans une plainte au commissariat de Perpignan. « Depuis, mes enfants et moi sommes terrorisés. On ne peut déjà plus ouvrir nos fenêtres à cause des odeurs, ma voisine menacée plusieurs fois ne sort plus de chez elle. Une autre est envahie par les cafards. À chaque fois qu’on nettoie les escaliers, il vient y déposer des saletés, des excréments sur les murs, le sol, les boîtes aux lettres, il nous crache dessus quand on passe. », égrènent désemparées les deux habitantes.

Les femmes ont sonné à toutes les portes, l’UDAF 66 (Union Départementale des Associations Familiales) dont dépend le résident placé sous curatelle, les forces de l’ordre, le bailleur… Jusqu’à présent, rien n’a pu être fait pour solutionner concrètement leur problème. « Il nous met en danger, alertent les voisines, démunies. On est paralysées par la peur, on dort les yeux ouverts. »

 

Trois Moulins Habitat : « Il s’agit d’une problématique de santé, on ne peut pas le mettre dehors comme ça »

Après l’incendie survenu fin septembre dans l’appartement du locataire souffrant de troubles psychiatriques, Trois Moulins Habitat a prévenu le curateur de l’UDAF en charge de son dossier. « Il a aussitôt activé une équipe mobile psychiatrique de l’hôpital de Thuir », indique Sindy Ducros, la responsable d’agence départementale de TMH. Depuis, le bailleur multiplie les approches juridiques. Appel à un huissier, requête pour obtenir l’autorisation de pénétrer dans le logement. « Il est encombré jusqu’au plafond, on doit absolument le débarrasser, réparer les dégâts de l’incendie et désinfecter », se mobilise Sindy Ducros. « Notre objectif est de sécuriser les voisins et l’immeuble. La mairie est en train de dresser un PV d’insalubrité pour une mise en demeure de nettoyer. » 

En parallèle, TMH indique avoir fait un signalement au parquet pour « situation préoccupante d’un majeur vulnérable. » Mais seuls le préfet, le maire ou la famille pourraient éventuellement enclencher une mesure d’hospitalisation d’office. Enfin, « une assignation en expulsion a été déposée en référé », souligne encore la responsable. « Nous n’avons pas d’autre moyen d’agir plus vite, regrette-t-elle.Tous les intervenants sont mobilisés, mais les moyens sont limités. Nous ne pouvons pas le mettre dehors comme ça. Aujourd’hui, tout ce qui peut être enclenché au niveau de nos prérogatives l’a été. On suit la situation de près, mais il s’agit avant tout d’une problématique de santé et on ne peut rien exiger à ce niveau. »

L’UDAF 66 : « On ne peut pas le forcer à suivre des soins ou à déménager »

La direction de l’UDAF 66 dit être régulièrement confrontée à des difficultés comme celles-ci. « On a essayé à plusieurs reprises de faire prendre en charge ce monsieur au niveau psychiatrique », mais jusqu’ici rien n’a abouti. Pour quelle raison ? Ce jeune quadragénaire, père de plusieurs enfants, est placé sous curatelle renforcée, confiée à l’UDAF 66, pour une « altération de ses facultés mentales, constatée médicalement ». Pour autant, souligne un responsable « nous n’avons pas le pouvoir de le forcer à suivre des soins, ni même à ouvrir sa porte, on encore à déménager. Et donc à recevoir de l’aide. »

Habitué à gérer des difficultés de cet acabit, l’organisme a fait plusieurs demandes d’hospitalisation sur requête d’un tiers. « Mais toutes les tentatives d’internement ont échoué. Et il faut bien mesurer que forcer une personne peut avoir des conséquences dramatiques. » En l’occurrence, l’UDAF a constaté que le malade n’était plus sous traitement. « Quand une personne comme ça est stabilisée, tout va bien, mais une rupture de soins peut entraîner une avalanche de conséquences, c’est ce qui s’est passé. » D’une manière générale, cela peut-il aller jusqu’à la violence ? « Au moins verbale, on en est victimes, dans nos locaux, très régulièrement », assure encore la direction de l’UDAF. 

A ce stade, l’organisme de tutelle, lui aussi, s’avoue démuni face à cette situation. Avec le sentiment d’avoir tout tenté. Et l’espoir partagé par tous que les choses ne vont pas empirer.

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