Économie

Paiement mobile : Trois questions au directeur du CMI, Rachid Saihi

Le Directeur du Centre monétique interbancaire (CMI), Rachid Saihi, a accordé un entretien à la MAP dans lequel il met en lumière l’évolution du paiement mobile au Maroc, les facteurs qui influencent son développement et les initiatives et les actions entreprises pour assurer son essor.

1. Quels sont les défis auxquels fait face le paiement mobile ?

Le développement du paiement mobile n’est pas une finalité en soit. L’objectif est double : d’une part à l’échelle des individus, il s’agit de rendre nos expériences quotidiennes, dans les échanges économiques et les transactions de commerce, plus agréables avec plus de rapidité et plus de sécurité. D’autre part à l’échelle du pays, il s’agit gagner des points de PIB additionnels en rendant notre économie plus efficiente et plus inclusive.

A ce jour nous avons au Maroc presque 8 millions de portefeuilles électroniques mais l’usage demeure très faible pour trois raisons.

Tout d’abord, le ciblage est trop large et les offres du marché sont génériques alors qu’elles devraient proposer des expériences diversifiées en fonctions des segments des usagers et des types d’écosystèmes (étudiants, artisans, commerçants, etc…). Jusqu’alors, nous avons collectivement positionné le paiement mobile comme un vecteur pour l’inclusion financière de citoyens non bancarisés, et qui sont constitués principalement des couches sociales défavorisés. Le grand défi fut alors d’adresser et d’embarquer cette clientèle potentielle dont le pouvoir d’achat, le niveau d’alphabétisation et l’appétence pour la technologie demeurent très limités. Une des toutes premières cibles du paiement mobile devraient être nos jeunes dont l’appétence pour la technologie et la facilité des échanges sont maximales. Ces jeunes sont les adultes de demain, et donc un usage adopté aujourd’hui par les jeunes est une assurance que cet usage se généralisera et se développera demain partout au Maroc.

Ensuite, l’usager du paiement mobile doit être mis en confiance quant au solde de son portefeuille électronique et à la possibilité de le transformer en achat ou en cash à tout moment et n’importe où au Maroc.

En outre, l’usager du mobile doit être informé et sensibilisé quant à la sécurité des transactions et les avantages du paiement mobile. A ce titre, des campagnes de communication digitales et radio ont été menées cet année et l’année dernière et se poursuivront en 2024 pour promouvoir les avantages des services proposés par les moyens de paiement mobile et faire connaître justement la marque nationale “MarocPay” qui est un standard permettant d’assurer la sécurité et l’interopérabilité des paiements mobiles.

2. Le paiement mobile pourra-t-il un jour remplacer le cash au Maroc ?

Le mouvement est déjà en marche, même s’il est trop long eu égard aux attentes. Nous devons l’accélérer évidemment avec des actions concrètes qui visent d’abord l’expérience client. Le cash aura évidemment sa place encore, et l’enjeu est de réduire la proportion du cash dans l’économie nationale au plus bas possible, dans l’objectif d’intégrer l’ensemble de nos acteurs économiques (personnes morales et physiques), d’accélérer les échanges et d’améliorer la performance globale de l’économie nationale.

3. Le paiement mobile finira-t-il par se faire une place parmi les autres modes de paiement populaires au Maroc ?

L’histoire de l’adoption de nouveaux usages est toujours la même, elle commence par le refus ou l’indifférence, puis dès les premières utilisations nous sommes en mesure de reconnaitre les avantages et les inconvénients avec comme conséquence soit l’adoption, soit le rejet.

Nous avons l’expérience de l’usage de la carte de paiement, des services de e-banking, du mobile-banking. Bien que le cash demeure prépondérant, nous assistons, par exemple sur notre plateforme de paiement de factures, à une progression en double chiffre des volumes. Ainsi, au 3ème trimestre 2023, le canal digital a capté 40 % du volume des transactions, soit une progression de 19% par rapport à la même période de 2022.

C’est pour cela que j’insiste sur les cas d’usages, et le ciblage fin des usagers pour accélérer le paiement mobile.

En ce qui concerne notre part au sein du CMI, nous avons été précurseurs dès 2019 dans le lancement de l’émission et l’acceptation des paiements mobiles et nous avons depuis lourdement investi pour permettre à notre infrastructure d’acceptation d’être au rendez-vous des initiatives nationales, y compris celles concernant les paiements mobiles.

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