Les récentes élections régionales en Allemagne ont secoué le paysage politique du pays, notamment dans les Länder de Thuringe et de Saxe. Le parti d’extrême droite Alternative pour l’Allemagne (AfD) a réalisé une percée historique, remportant une victoire sans précédent en Thuringe et arrivant en deuxième position en Saxe.
En Thuringe, l’AfD a obtenu 33,1% des voix, devançant largement l’Union chrétienne-démocrate (CDU) qui n’a recueilli que 24,3% des suffrages. Cette victoire marque un tournant dans l’histoire politique allemande depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, bien que les autres partis refusent catégoriquement toute alliance avec l’AfD.
En Saxe, la course a été plus serrée, avec la CDU en tête à 31,7%, suivie de près par l’AfD à 31,4%. Ces résultats témoignent d’un changement significatif dans les préférences électorales des citoyens de l’est de l’Allemagne, où l’AfD gagne en popularité.
L’émergence d’une nouvelle force politique
Le nouveau parti de gauche radicale, le PSV, a également fait une entrée remarquée sur la scène politique. Fondé en janvier par Sahra Wagenknecht, ancienne membre du parti Die Linke, le PSV a obtenu plus de 10% des voix dans les deux Länder. Cette performance pourrait lui conférer un rôle de faiseur de roi dans la formation des futurs gouvernements régionaux.
Les messages anti-immigration et pro-paix avec la Russie de l’AfD et du PSV ont trouvé un écho particulier dans ces régions de l’ex-Allemagne de l’Est. Ces partis ont également capitalisé sur les inquiétudes liées à l’économie et à la hausse des prix, exacerbées par la guerre en Ukraine.
Ces élections ont également mis en lumière les difficultés de la coalition au pouvoir à Berlin. Le Parti social-démocrate du chancelier Olaf Scholz n’a obtenu qu’entre 6,6% et 7,8% des voix, tandis que les Verts et les Libéraux ont connu des revers importants, perdant leur représentation dans certains parlements régionaux.
L’AfD, fondé en 2013 comme un parti eurosceptique, s’est progressivement transformé en une force politique anti-immigration. Son ascension a été favorisée par la crise migratoire de 2015, la pandémie de Covid-19 et la guerre russo-ukrainienne qui a fragilisé l’économie allemande.
Le parti a récemment atteint un record historique lors des élections européennes de juin, obtenant 15,9% des suffrages au niveau national, avec des résultats particulièrement élevés dans l’est du pays.
La popularité croissante de l’AfD dans les régions de l’ex-Allemagne de l’Est s’explique en partie par les inégalités persistantes depuis la réunification en 1990 et une crise démographique profonde liée à l’exode des jeunes, malgré une reprise économique dans ces régions.
Ces résultats électoraux interviennent dans un contexte tendu, marqué par une récente attaque au couteau à Solingen, dans l’ouest du pays, revendiquée par l’État islamique. Cet incident a ravivé le débat sur l’immigration en Allemagne et a été exploité par les dirigeants de l’AfD pour critiquer les politiques migratoires du gouvernement.
Face à ces défis, le gouvernement de Scholz a annoncé un renforcement du contrôle de l’immigration et des restrictions sur l’usage des armes blanches. Ces mesures visent à répondre aux préoccupations croissantes de la population en matière de sécurité et d’intégration.
Les résultats de ces élections régionales pourraient avoir des répercussions importantes sur la politique nationale allemande, à un an des élections législatives prévues en 2025. Ils reflètent un mécontentement croissant envers les partis traditionnels et une polarisation accrue de la société allemande.
Alors que l’Allemagne fait face à ces défis politiques et sociaux, la question de l’intégration des communautés immigrées, dont les Marocains, reste au cœur des débats. L’évolution du paysage politique pourrait avoir des implications significatives pour ces communautés, nécessitant une vigilance accrue quant à leurs droits et leur place dans la société allemande.